24/04/2025
Prochain projet éditorial : Vilanova Artigas
Voici 24 ans, je recevais de Margarida Serrao, collaboratrice portugaise de l’Atelier, un livre sur Vilanova Artigas, le mythique livre bleu de la Fondation Lina Bo Bardi, première monographie consacrée à l’architecte. Ce livre aura un impact déterminant sur mon travail (à commencer sur ma propre maison). J’ai épluché l’ouvrage et notamment abondamment annoté ses textes.
En ce mois d’avril 2025 nous avons organisé sur 15 jours les séances de travail avec les diverses organisations qui gèrent le fonds de l’architecte brésilien Vilanova Artigas à Sao Paulo.
Au terme de ce voyage qui a permis les visites spécifiques des œuvres d’Artigas (La FAU, les maisons du couple Artigas, la maison Domschke (1974), l’école de Guarulhos), je relis mes notes sur le livre qui se veut la mise à disposition de l’ensemble des textes d’Artigas couvrant une période allant de 1945 à 1984. Durant les diverses réunions éditoriales dans le bureau de Marco Artigas et avec la traductrice Lucia Leistner en visio, nous avons arbitrés les choix du matériel qui sera repris dans l’ouvrage.
Construire un livre, ce n’est pas publier des documents, produire des signes, c’est beaucoup plus que cela. Le livre prend sa forme progressivement, exactement comme un projet architectural ; les contenus se dévoilent lors des rencontres, lors des visites des lieux. Par exemple, la visite de la maison Domschke fait apparaître une véritable science cinématographique d’Artigas. Cette dimension me fait demander à entendre sa voix, à le voir en train de débattre. La famille retrouve des archives d’un fim où il explique sa position face caméra avec une conviction très expressive. Nous publierons les logogrammes de cette séquence.
Le livre se proposera d‘être notamment une caisse de résonance de la situation politique actuelle et des outils que l’architecture offre pour contribuer à un monde plus harmonieux, interpeller les politiques, proposer des espaces d’émancipation et de responsabilisations.
Sao Paulo a une croissance immaîtrisable par la sphère politique et publique. Dès lors, les œuvres d’Artigas (de Mendes Da Rocha et de Lina Bo Bardi notamment au travers des CESC) ont une puissance narrative et d’engagements véritablement exemplaires. C’est une part de ce que la sphère de la production architecturale brésilienne (et plus largement latino-américaine) peut apporter au débat de la production architecturale sur nos continents.
Sur cette terrasse, face au cimetière d’Araca à deux pas de l’avenue Paulista, je réfléchi à la position exceptionnelle d’Artigas tant son engagement est cohérent, créatif et continu comme enseignant, qu’innovant en matière de la pédagogie complète de la FAU, qu’en architecture, que dans la constitution de l’ordre des architectes, qu’en politique. Ces situations diverses et la répression permanente de ses activités les 20 dernières années de sa vie ont exacerbé les matières paradoxales et les tensions permanentes qu’il devait traverser et sur lesquelles ils devaient se positionner. La beauté du parcours tient à la résolution de tous ces éléments en tension dans la narration et la construction de réponses spécifiques au travers son architecture. C’est ce qui lui confère ces parts d’intelligence, d’engagements et d’émotions si particulières et en fait une figure totalement unique dans le paysage des architectes du XXème siècle.

